[RPG] Ca ira mieux un autre jour...[PV Alexiel][Terminé]

Seryel haïssait. Il haïssait le monde, il haïssait cette vie misérable qu'il vivait. Il portait sur le monde un regard déformé, teinté qu'il appelait haine pour ne pas voir que c'était autre chose. Il s'aveuglait volontairement, car parfois la connaissance faisait trop mal. Il haïssait sa lucidité aussi. Il se haïssait tout simplement. Mai spar dessus tout, il haïssait le soleil. Il le haissait de partir et le laisser tout seule dans la nuit.
La nuit... C'était quand elle était là que tout devenait affruex. C'était quand il se retrouvait plongé dans les ténèbres qu'il haïssait le plus cette vie. Car en plus des tenebres froides de la nuit, c'était l'ombre dans son propre coeur qui remontait, elle et ses miasmes affreux. C'était elle qui l'envellopait et le bercait. Elle qui se glissait sournoisement dans sa bouche et ses narines et l'emplissaient d'une envie de vomir indescriptible.
C'était quand il était plongé dans le noir, lorsque garder son masque de haine et de froideur austère devenait inutile, qu'il se retrouvati le plus vulnéralbe. C'était à ce moment qu'Elle arrivait. La solitude. La peur, le péché, le remord, la tristesse. Toutes ces entités qu'en plein jour il pouvait ignorer, repousser, elles revenaient l'emporter une fois que le soleil s'en allait.

Et comme si elles n'avaient attendu que ça, toutes les âmes qu'il avait fauchées revenaient, le mordairent, carressaient son esprit, lacéraient son âme. Elle murmuraient, le trouvaient lorsqu'il les fuyait et demandaient. Pourquoi. Pourquoi les avait t'il tuées? Pourquoi existait t'il? Qu'est ce qu'il était? Même dans l'étreinte de Morphée, surtout là en fait elles restaient, le suivaient, le bercaient de leur incessante mélopée.
On ne pouvait pas être malmené par toutes ces âmes. Il le savait bien, mais il voulait se persuader que c'était ça, que ce n'était simplement pas le poids de son remords qui l'entraînait au fond des abysses de ses angoisses. Parceque ca aurait voulu dire qu'il avait un bon fond. Parceque ca aurait signifié qu'il n'était pas mauvais. Et alors, il n'aurait pu comprendre, n'aurait pas pu. Si il était bon, alors pourquoi l'avait on abandonné? Pourquoi le premier geste qu'on avait eu envers lui avait t'il été un geste de haine? Haine... Oui, il ne méritait que ça. La haine, il n'avait droit qu'à ça.

Et cette nuit avait été pire que les autres. Cette nuit, il l'avait passée à se tourner et se retourner en core dans son sommeil. Cette nuit, il l'avait passée à hurler dans son sommeil sans pour autant pouvoir fuir les chimères qui le tourmentaient. Et lorsqu'enfin il s'était réveillé, c'était l'aube. Le soleil était de retour. Alors il pouvait se permettre de le haïr à nouveau. Alors il pouvait à nouveau endosser ce rôle qu'il s'était fabriqué de toute pièce, alors ou pouvait à nouveau... Mais non. Pas cette fois ci. Cette fois ci, il était à bout. Ca faisait trois ans qu'il était comme ça. Ca faisait trois ans qu'il fuyait, trois ans qu'il se fuyait lui même. Ca faisait trois ans qu'Il lui avait donné une raison de vivre, mais à présent, même cette raison ne suffisait plus. Il en avait marre, il était à bout. Il était épuisé. Tout ce qu'il voulait, c'était trouver le repos, fût-il éternel.

Alors il s'était levé, avait traîné les pieds, avait pris appui contre le mur. Il ne tenait pas debout. C'était sans doute dû au manque de someil. Il s'était traîné jusqu'à ses vêtements, s'était habillé et était sorti. Il avait marché dans la rue encore vide de monde, vide de passants. Vide. Tout comme son coeur. Par habitude, il avait volé un pomme. Après tout, il falait qu'il mange. Alors il avait croqué dans le fruit, mais était tombé à genoux pour mieux pouvoir vomir. C'était rien. Le manque de someil sans doute. C'était ça. Le manque de someil. Il s'était levé, avait fait deux ou trois pas, s'était engagé dans une ruelle vide. Vide. Seul. Quitte à être faible, autant être sans personne pour vous voir. C'était mieux comme ça. Les chats en faisaient de même. Lorsqu'ils étaient malades, ils s'isolaient dans leur coin .
Non, il n'était pas malade, hein? Il s'appuya dos contre un mur et se laissa glisser au sol, sans force. Fatigué. C'était ça, il était juste un peu fatigué... Juste fatigué.

Une journée sans Edward. C'est inconcevable en été. Pourquoi ? Parce que je crève de chaud et mon chéri est mon frigo personnel. Nan, c'est méchant, je sais. Je ne dois pas dire ça d'Edward. Ne pas se moquer de sa nature qui veut qu'il soit aussi congelé qu'un bloc de glace. Etre un vampire, ça a des avantages, mais des défauts égalements. Je me suis toujours demandé si un jour, j'entendrais le coeur de mon amour battre. Je pense que je peux faire une croix dessus, il est un vampire et ce à jamais. Aucune chance d'entendre son palpitant battre pour moi. Je me sens un peu triste dans un sens. Il est douloureux de ne pas savoir ce que ressent la personne qu'on aime. Pour moi, Edward est difficile à comprendre. Mais en même temps, je ne cherche pas vraiment à savoir ce qu'il ressent. Parce qu'il a droit à ses propres secrets, et même si ça me fait du mal de le voir des fois hésitant, renfrogné, triste, je ne peux m'empêcher de rester silencieux et d'attendre que ces sentiments passent.

Alors aujourd'hui, je suis sorti de mon manoir, vêtu de vêtements courts pour plus de confort -bah oui, je ne supporte pas baigner dans ma transpiration-, et je déambule dans les rues à la recherche d'une quelconque occupation. Je pense aussi. Je pense à ce que je pourrais faire aujourd'hui, sans mon amour. A ce que serait ma vie plus tard, comment je mourrais ... C'est bien triste comme songe, n'est-ce pas ? Mais ce n'est rien comparé à ce que je vais endurer dans très peu de temps.

En effet, j'ai beau me balader sans but précis, je me perds à travers les ruelles et je me retrouve dans une impasse. J'aperçois une ombre, puis une silhouette avachie au sol. J'hausse les sourcils, puis je m'approche délicatement de la personne en difficultés.

~ ... ! ~

C'est lui. Je le sais. Je le vois, là, faible et crachant toutes ses tripes. Qu'il peut être en piteux état ! Je m'avance d'un pas. J'ai peur. Oui, mon coeur bat trop vite. Celui que je cherche depuis si longtemps, celui dont j'en ai absolument pas parlé à Edward. Cette moitié que j'ai perdu, cette partie de moi qui s'en est allée, ce gros bout de moi-même que j'aime tant. Pas comme un amant, mais comme un frère, comme un deuxième moi. Toi qui as englouti mes souvenirs, toi qui m'as volé mon intelligence, ma connaissance, tu as l'air si mal en point.

~ Se ... Ryel ... ~

Ca brûlait, ca tournait. Le monde s'était changé en une fournaise tourbillonnante sans nom. Le monde tournait, virait, dansait. Le monde dansait, n'était-il point fantastique? Il dansait, rien que pour lui. C'était la première fois que quelqu'un dansait pour lui. Que ça soit le monde rendait le geste encore plus beau... A moins que ça ne soit l'enfer. Il était en enfer? Non, impossible. L'enfer, il y était déjà, et ce depuis sa niassance. Si jamais il était envoyé là bas, ca voulait dire qu'il était mort, mais alors ça prenait plus des airs de Paradis. Ces notions étaient inconciliables. Il était pas mort. Ca aurait été trop beau. Domage. Non! Pa sdomage. Il ne devait pas mourir! Zut... Bon, pas grave. Cette brume est reposante. Pour une fois, Seryel avait l'occasion de ne pas se haïr. Il était trop épuisé pour ça. Pour une fois, il pouvait arrêter de se sentir menacer. Après tout, à quoi bon craindre pour sa vie alors qu'on est déjà à moitié dans l'étreinte de la Mort?
Et soudain, tout fut balayé. Chaud, froid, douleur, tristesse, lassitude. Tout parti, consumé par une brusque lumière. Une lumière qui faisait mal. un lumière qui lui donnait envie de pleurer. Une lumière chaleureuse et acceuillante. Une lumière tellement emplie d'amour qu'elle l'effraies. Une lumière qui lui rappela celle qui l'avait tirée de sa catatonie il y a de cela trois ans. A la seule différente que celle là, elle faisait moins mal. Elle était douce. Et ne brûlait pas, et pourtant, il avait moins froid. Un bruit de pas le forca à se tirer du semi coma dans lequel il était plongé. Kheine? C'était lui? Non. Il était parti. C'était pas Kheine. C'était mieux, c'était pire. C'était...

Alexiel.

Son Alexiel. Pourquoi était t'il là? Pourquoi? Que faisait t'il ici? Ce n'était pas sa place. Alexiel n'avait rien à faire dans les ruelles sombres. Alexiel devait aller là où c'était beau, là où il y avait de la lumière. Il ne devait pas. Il devait lui laisser les ténèbres, la saleté et le pêché, il ne devait pas... C'était mal... C'était impossible. Alors il leva la tête, et il le vit là, juste en face de lui, avec le même visage que le sien, dévoré lui par une sourde angoisse. Pourquoi? Pourquoi était t'il là? Pourquoi ne le frappait t'il pas? Pourquoi alors qu'il était faible? C'était le moment. "Frappes moi... Hais moi... C'est bien ce que tu dois faire, non?C'est pour cela que je suis né. Être hai."
Ses yeux parlaient pour lui. Ses yeux, la seule chose encore capable de s'exprimer.
Une brusque quinte de toux monta, lui donnant la sensation d'être déchiré de l'intérieur. Ah, ca faisait mal. Et Alexiel ne bougeait pas. Un mince filet de sang coula à la comissure de ses lèvres. Allons donc. Ca aussi c'était de la fatigue?

-C'est un rêve c'est ça?

Oui, c'était ça.Un rêve. Un drôle de rêve Le seul rêve où il n'était pas agressé par ses propres sentiments. Le seule rêve qui ne se changeait pas en cauchemar, c'était celui où Il venait le voir. Il devait penser à être aux portes de la mort plus souvent, si c'était pour Le voir. Après tout, dans un rêve, il était le seul à se voir. Dans ses rêves, il avait le droit de l'aimer, non? Là où personne ne pouvait le voir comme il était, un monstre, il avait le droit de ne plus haïr sa moitié... Il avait le droit de ne plus faire ce pour quoi on l'avait désigné. Il pouvait, hein?

-Si tu savais combien de fois j'ai espéré te voir...

Puisque c'était un rêve, il avait le droit de dire la vérité, pour une fois, non? Juste pour cette fois.

Seryel.

Je le vois, à travers ton regard, que pendant ces trois années de ta vie non-désirée tu étais rejeté et mal aimé. Mais une seule personne te considère comme ce que tu n'espères jamais: moi. Regarde-moi, Seryel. Regarde-moi et dis ce que tu vois dans mes yeux ocres. Murmure-le moi, que j'en frissonne de plaisir. Je me sens tout bizarre quand je suis avec toi, comme si mon corps ne voulait faire qu'un avec toi, ma moitié. Après tout, il est bien normal qu'on s'attire, tous les deux. Nous sommes un.

-C'est un rêve c'est ça?

Pourquoi en serait-ce un, Seryel ? Je me penche vers lui, tendant délicatement mes bras vers lui. Lentement, je le saisis comme s'il était une poupée de porcelaine, calant ma tête contre son cou. Doucement, je hume son odeur qui m'est propre également, resserrant faiblement mon étreinte. Oh combien tu m'as manqué, ma moitié !... Me sentir près de toi me rassure. Me savoir là, dans tes bras, à poser mes douces lèvres contre ton cou un peu chaud, me procure un soulagement intense. J'avais peur de te perdre à jamais, me disant que je ne serais plus jamais moi-même. Mon esprit, scindé en deux âmes, Seryel et Alexiel. J'essaie de lui redonner des forces, à son pauvre corps tout tremblant. Mais dans quel état es-tu tombé, ma moitié ?...

-Si tu savais combien de fois j'ai espéré te voir...

Les larmes me montent aux yeux. Jamais. Jamais je l'ai oublié. Oui, même si j'ai perdu la mémoire, Seryel, lui, je ne l'ai pas abandonné. Et chaque jour qui passe, c'est un peu plus s'il mange mon cœur déjà fatigué. Si Edward est l'amour de ma vie, alors Seryel, lui, est mon amour fraternel. Lui est moi, je suis lui. Et ça n'est absolument pas prêt de changer. Je décolle doucement mes lèvres de sa nuque, frottant mes mains dans son dos. Je plante mes iris dorées dans celles cramoisies de mon double, essayant vainement de le ramener à la raison. Ma chevelure blonde tombant en cascade dans mon dos, j'approche ma bouche de son oreille avant de lui murmurer d'une voix chevrotante:

~ On me dit que le destin se moque bien de nous, qu'il nous donne rien et qu'il nous promet tout. ~

Seulement voilà. Seryel est dans mes bras, et il me sera difficile de le lâcher. Celui que j'ai cherché pendant tant de temps, essayant à tout prix de stopper ce calvaire qu'il endure ! Les larmes coulent le long de mes joues, ces gouttes salées qui matérialisent ma tristesse et mon cœur déchiré.

~ Il paraît que le bonheur est à portée de main, alors on tend la main et on se retrouve fou ... ~

Alexiel était là... Et Seryel priait pour que son rêve ne s'arrêtes jamais. Ses prières les plus ferventes s'adressaient à tous. A ce Dieu qu'il haissait tant, à Satan, à son père, son frère, celui qui n'était pas dans son rêve, à Morphée... Tous, il les priait tous, les suppliait intérieurement de ne pas le laisser se réveiller tout de suite, de le laisser encore un peu rêver. Juste un peu. Après, il souffrirait de tout son soul lorsqu'il se réveillerait. Après, il regretterait amèrement d'avoir fait un tel rêve lorsqu'il se réveillerait seul dans son pensionnat, ou dans la rue, il ne parvenait pas à se souvenir de quand il s'était endormi. S'était t'il seulement réveillé? Après, c'était ça. Après.

Et son fantasme onirique ne partait pas, il ne se modifiait pas. Et c'était tout aussi bien. "Bon anniversaire" pensa t'il amèrement. Considérer un fantasme sorti entre deux phases de sommeil profond comme le présent de trois ans d'existence. Il y avait de quoi se sentir un peu amer. Amer et heureux. Un cadeau, ça se savoure. Et puis c'était le deuxième qu'on lui offrait. Le premier avait été offert par Kheine, et il s'appelait la haine. Cadeau empoisonné, bouée brûlante qui lui avait permis de ne pas sombrer dans les abysses du désespoir, mais qui continuait encore maintenant à réduire les mains de son coeur en une charpie sanguinolente. Son deuxième cadeau donc. UN cadeau qui allait faire tout aussi mal, mais à retardement lorsqu'il ne serait plus là. Mais la question du futer n'était pas abordée. Le futur n'était qu'un trou empli d'un noir désespoir incertain. Le présent, bien qu'était tout aussi douloureux que le passé avait pour mérite d'être plus coloré. Moins effrayant. Et actuellement, son présent le rendait coloré, chassant le rouge et bleu et les remplassant par un jaune chaleureux et acceuillant. Le bonheur. C'était comme ça que ce jaune s'appelait.

Et son rêve le pris dans ses bras. Seryel resta un moment sans rien faire, les bras ballants, envellopé dans sa propre odeur, chatouillé par des cheveux plus doux que les siens car mieux soignés. Son esprit ne parveanias plus à suivre. En fait, il l'avait laché depuis un bon moment déjà. (ah le salaud) Sa raison n'était plus qu'un doux mirage perdu loin, très loin derière les brumes de la maladie. Il n'était plus capable de tenir un raisonnement logique, incapable de se rappeler qu'il n'avait pas le droit d'être aimé, pas le droit d'aimer. Et son corps prit les commandes. Si son coeur avait été abîmé, si son esprit altéré par de mauvaises pensées, son âme traumatisée par cette séparation qui avait manqué de la tuer, son corps, lui, se souvenait de tout. Il savait ce qu'il devait faire, savait ce qu'il pouvait faire, son jugement nullement altéré par la froide illogique du coeur.
Ses bras tremblants se levèrent donc, et passèrent dans le dos de sa moitié, l'emprisonnant en une faible et tremblante étreinte. Avec Alexiel... C'est là qu'il aurait toujours dû être. C'était là qu'il était avant, c'est là qu'il doit être. C'est là où il ne sera plus jamais vraiment. Alors ça faisait du bien. Ca soulageait, ca comblait les vides que son absence avait laissé. Et ca faisait mal.

Je n'espere plus rien de lui. Mis à part la mort. Mais même ça il ne me la donnera pas.

Il avai tbeau l'espérer, même si on la lui proposait, il la refuserait. Si il mourait, Alexiel le suivrait. Alexiel. Lui aussi il ne poura pas l'accepter ailleurs que dans son rêve. Il ne le méritait pas. Il ne devait pas. Il risquait de l'abîmer, de le salir. Il n'en avait pas le droit. Un tel cadeau ne lui était pas destiné. On le lui avait bien fait comprendre le jour de sa naissance. En trois ans, il avait appris à se faire une idée et à rester à sa place. En trois ans, il avait appris à n'offrir à son coeur que des désirs à demi avoués lors de moments de perdition, et à s'en contenter.

Si c'est ça être fou alors je ne veux plus de ma raison.

Si ça lui permettait de pouvoir rester avec lui, alors oui, il la donnait, l'offrait à qui la voulait. *plic* une goutte salée tomba sur son épaule. Seryel le repoussa pour contempler avec une horreur sous jaccente (il était trop shooté pour réagir totalement). Pourquoi il pleurait? Non, ca n'allait pas!! Il ne devait pas pleurer!! Même en plein rêve, il ne pouvait pas! Il n'avait pas le droit!
Alors, il fit un gros effort, se redressa péniblement, mobiliisant le peu de forces que sa moitié lui avait transmi sans s'en rendre compte (l'aurait t'il su qu'il aurait hurlé), et inspecta du regard rapidement son corps.

Quelque chose ne va pas? Tu es blessé quelque part?

Ca faisait un peu bête? En fait, Seryel, lors de la sépation n'avait pas embarqué l'émotivité dont sa moitié faisait peur. De même que sa faculté à pleurer. En trois ans, il n'avait pas versé une seule larme. Le fait qu'on puisse pleureur de bonheur lui était donc totalement étranger.

Seryel est là, tremblant, égaré, blottit contre ma poitrine. Rien que le penser me mets du baume au cœur. Mon frère, ma moitié, celui que j'ai tant regretté, désiré, cherché, te voilà, tout contre moi. J'aimerais le garder contre moi, ne plus jamais le lâcher, faire que le temps s'arrête pour que je puisse soigner mon cœur déchiré par son absence. Et pourtant, je sais bien que ça ne durera pas. Et ca me blesse. Mais pas plus que de voir, ressentir au travers de la déchirure béante de son esprit moribond toute la souffrance et les mensonges qui lui ont lacéré le cœur pour le maintenir en vie jour après jour. Vivre en se haïssant, c'est une punition. Vivre en faisant de sa souffrance un devoir d'une vie une hérésie. Mais dis moi, mon frère, comment te faire comprendre que tu n'est pas né pour porter nos fautes en fanion?

Et voilà que Seryel se met en mouvement. J'ai beau me préparer à son rejet, me dire que même si il prétend le contraire, il ne me déteste pas, ca me fais un peu de peine. Je ne veux plus qu'on me sépare de lui , que ca soit lui ou un autre. Je ne veux plus qu'il souffre pour deux, juste parce qu'il est né. Et mes yeux s'écarquillent brusquement lorsqu'au lieu de me repousser ses bras s'enroulent autour de moi, acceptant ma faible étreinte, seul réconfort que j'aie pu lui apporter. C'est chaud. Ça chasse le froid qui stagnait dans une partie de ma poitrine. Seryel. Je suis Seryel, Seryel est moi. Nous ne sommes plus qu'un, unis. Même son cœur s'est ouvert à moi. J'ai la sensation que si j'approche, je pourrais entrer dans son esprit sans aucun souci. Mais je ne le fais pas, conscient que ma présence lui est aussi douloureuse que bénéfique. Mes larmes coulent à présent librement sur mes joues, tandis que je continue de soigner son pauvre corps à l'aide de l'énergie qui circule dans mon corps. Parfois, je suis vraiment heureux d'être un ange. En réponse à ses pensées coupables qui résonnent et ébranlent tout mon être, mes lèvres s'ouvrent d'elles même, et j'articule doucement contre son oreille comme un trésor qui ne lui est destiné qu'à lui seul:

~ Je t'aime Seryel. Depuis notre naissance et jusqu'à la fin. Alors ne me rejette plus. ~

Arrête de croire que l'amour t'es refusé. C'est faux, la preuve, je t'aime. Arrête de croire que tu n'aurais jamais dû exister. La Nature t'aurait déjà éliminé si ça avait été le cas. Il semble tellement fragile! Dans mes bras, on ne dirait pas qu'il a hérité de tous les pouvoirs destructeurs de notre part angélique commune. Même les battements de son cœur sont atténués et semblent prêts à s'éteindre définitivement d'une seconde à l'autre. Mon pauvre frère, depuis combien de temps n'a-t-il pas pris soin de son corps? Lui même est couvert d'ecchymoses et de griffures, et particulièrement au niveau des avants bras. Se serait il mutilé? En même temps que de torturer son propre cœur, il a aussi détérioré son corps du mieux qu'il pouvait?

Une nouvelle boule monte et bloque ma gorge. Tout ça c'est de ma faute. Toute la souffrance qu'il a endurée, toute sa solitude... C'était parce que je n'étais pas là quand il est né. J'ai beau être faible et pleurer au moindre coup, de nous deux, c'est Seryel qui est le plus fragile. Je le sais, je le sens. Derrière ce masque froid, il est instable, effrayé. Il prétend que je suis né innocent, mais c'est faux. A la naissance, son esprit était aussi vierge que celui d'un nouveau né. Il aurait dû être aimé, protégé. Et au lieu de ça, Rosiel l'a abandonné. Je l'ai abandonné, je n'ai pas pu protéger mon frère.

~ Ta raison est ma raison ... ~

Si tu savais comme tes mots me font mal! Au travers d'eux, c'est le calvaire qu'il a enduré pendant trois ans qui se déverse en moi. Et pourtant...Petit à petit, peut être ne s'en rend il pas compte, mais il m'accepte. Lentement, mon frère revient vers moi. Mon cœur est en charpie. C'était injuste. Injuste qu'il soit le seul à souffrir. C'était impossible même, alors pourquoi ne voulait il pas le voir ?!
Et soudain, il s'était redressé, et je me maudis intérieurement. Même à l'agonie, il continue de s'inquiéter pour moi. Et moi, je suis donc incapable de faire autre chose que causer du souci aux autres Je suis tellement faible! Je me redresse, essuie prestement ces traitresses qui coulaient, et continuent de s'épancher librement sur mes joues.

~ N...non! Ça...v...va ! ~

Je hoquete, bégaie. Non, ca ne va pas. Mon frère est à moitié mort et il pense qu'il le mérite bien. Mon frère souffre depuis trois ans, et il continue de souffrir à cause de ma faiblesse. Non, ca ne va pas. Je pleure, et mon frère va sûrement croire que c'est encore de sa faute! Et il va vouloir partir, parce qu'il pense que c'est son devoir. Tiens, le voilà qui tente de se relever.

~ Non ! ~

Je l'attrape et le fais se rassoir d'une simple pression. Mon dieu! Il est si faible! Une faible lueur d'amusement traverse le brouillard de ma tristesse en lisant la lueur d'incompréhension dans son regard. Les soins que je lui prodigue ne font plus effets. Il s'affaiblit de seconde en seconde. Je panique. Que faire pour l'aider?! Voilà que ses yeux se ferment. Ses épaules s'affaissent. Il s'est endormi dans mes bras. S'est-il rendu compte que sa main s'est accrochée à mon t shirt? Je n'arrive pas à le soigner. Finalement, je finis par comprendre pourquoi. Même malade il continue à rejeter toute aide extérieure! Les larmes perlent à nouveau à mes yeux. Finalement, je prend une décision. Je me relève, mon frère dans les bras. Il est si léger! Malgré mon allure gracile, j'ai une certaine force, encore une fois grâce à ma nature angélique. D'ailleurs, mes ailes se déploient, et je décolle avec mon précieux chargement, volant en zigzags le temps de m'habituer à voler avec un tel poids. Je rentre au manoir Edgeworth. A la maison. Il y aura de quoi le soigner là bas. Pour une fois que ma faible constitution servait à quelque chose. Il y avait de quoi fournir tout un hôpital là bas...